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  • L'Iran, une économie sous sanctions entre résilience et effondrement
    Jun 27 2025

    Quarante-huit heures après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu entre Israël et l’Iran, le guide suprême Ali Khamenei a revendiqué la victoire. Pourtant, en coulisse, un autre front reste actif. Celui de l’économie. Sous sanctions depuis des décennies, frappée par une inflation galopante et une devise en chute libre, l’économie iranienne semble tenir. Décryptage.

    La République islamique se targue de résister aux pressions extérieures, mais cette résilience a ses limites. Le rial iranien ne cesse de s’effondrer : il faut désormais plus de 42 000 rials pour un seul dollar américain. L'inflation est ainsi fulgurante, estimée à 43 % par le Fonds Monétaire International. Les produits de première nécessité deviennent inaccessibles pour une grande partie de la population. Selon les estimations, entre un tiers et la moitié des Iraniens vivent sous le seuil de pauvreté. Cette détérioration s’est aggravée après la réimposition des sanctions américaines en 2018, lorsque Washington s’est retiré de l’accord sur le nucléaire. L’Iran, déjà isolé, s’est alors vu couper l’accès au système bancaire international et privé de dollars.

    Une économie sous sanctions, mais jamais à l’arrêt

    Malgré l’isolement, Téhéran n’est pas resté sans ressources. Le pays a renforcé ses partenariats avec la Chine, la Russie, la Turquie ou encore l’Inde. Et surtout, il a su contourner les sanctions grâce à des raffineries chinoises opérant discrètement sur son sol, surnommées teapots, ou à une flotte fantôme de 400 navires transportant clandestinement du pétrole. Ce système s’appuie sur un modèle économique à deux vitesses. D’un côté, un capitalisme d’État dominé par les Gardiens de la Révolution, omniprésents dans les secteurs clés (énergie, télécoms, BTP). De l’autre, une économie informelle florissante, basée sur la contrebande et les circuits parallèles. Selon certaines estimations, le marché noir représenterait jusqu’à 40 % du PIB.

    Le pétrole, force vitale et talon d’Achille

    La récente guerre éclair avec Israël a touché un nerf sensible : les infrastructures énergétiques. Raffineries, oléoducs, terminaux pétroliers ont été visés, menaçant la première richesse du pays. Car malgré tout, l’Iran demeure un géant énergétique, troisième réserve mondiale de pétrole brut. Mais cette dépendance au pétrole, ajoutée à une gestion opaque et centralisée, rend l’économie extrêmement vulnérable. Paradoxalement, c’est ce système verrouillé, résilient mais étouffant, qui permet au régime de se mainteni, au détriment d’une population de plus en plus étranglée.

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  • Les droits de douane de Donald Trump continuent de redessiner le commerce mondial
    Jun 26 2025

    Une étude du cabinet McKinsey révèle les profondes répercussions des mesures douanières américaines sur les échanges internationaux. Alors que la Chine perd du terrain, l’Europe s’impose comme un acteur central dans la nouvelle cartographie commerciale mondiale

    Depuis le 2 avril, les droits de douane imposés par Donald Trump restent en vigueur. Même s'ils font moins la une de l’actualité, leurs effets sont toujours bien réels. Le cabinet McKinsey vient de publier une étude qui confirme l’impact majeur de ces mesures sur le marché mondial.

    Initiée par les États-Unis, cette guerre douanière cible en priorité la Chine. Tous les produits fabriqués dans ce pays et importés sur le sol américain sont désormais taxés à hauteur de 30 %. Pour les autres pays, la taxe est fixée à 10 %. Ces règles modifient en profondeur les dynamiques commerciales. Selon McKinsey, une tendance forte se dégage: le « friendshoring ». Cette stratégie consiste à privilégier les échanges avec les alliés géopolitiques. La conséquence, c'est celle-ci, les importations américaines en provenance de Chine ont chuté de 34,5 % depuis le mois d’avril. Face à cette baisse, l’Organisation mondiale du commerce a dû revoir ses prévisions. Au lieu d'une hausse attendue de 2,7 %, le commerce mondial devrait reculer de 0,2 % cette année. Le monde entre ainsi dans une phase de fragmentation économique.

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    L’Europe, pivot d’un nouvel équilibre mondial

    Face à la baisse des exportations vers les États-Unis, la Chine redirige sa production vers l’Europe. Paradoxalement, cette guerre commerciale profite donc au Vieux Continent. D’après McKinsey, les pays européens pourraient fournir jusqu’à 55 % du marché mondial d’exportation destiné à remplacer les produits chinois aux États-Unis. En d'autres termes, l’Europe serait en mesure de couvrir un besoin sur deux en produits substituts. Cependant, certains secteurs restent hors de portée. Dans le manufacturier et l’électronique, ce sont les pays d’Asie du Sud-Est qui prennent l’avantage. De leur côté, les consommateurs américains risquent de subir un déficit d’approvisionnement estimé à plus de 100 milliards de dollars. Cela pourrait entraîner des pénuries sur des produits essentiels comme les ordinateurs portables, les smartphones ou les écrans, mais aussi une hausse généralisée des prix.

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    Vers une bipolarisation économique ?

    Cette recomposition des flux commerciaux pourrait dessiner un monde économique à deux vitesses : d’un côté, les pays qui maintiennent des liens avec la Chine ; de l’autre, ceux qui s’en détachent. L’enjeu devient alors de trouver de nouveaux partenaires ou de renforcer ceux déjà établis. Pour l’Europe, cela représente une opportunité majeure : ses exportations vers les États-Unis pourraient augmenter de 200 milliards de dollars. Mais cette dynamique reste à double tranchant. Car la Chine, en se tournant vers l’Europe, y intensifie également sa présence commerciale. Un défi pour les industriels européens, qui doivent jongler entre nouvelle demande américaine et concurrence asiatique accrue.

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  • Guerre Israël-Iran: les compagnies aériennes face à une envolée des coûts
    Jun 25 2025

    Alors que l'Autorité des aéroports israéliens annonce un retour progressif à la normale, les perturbations causées par la guerre entre l’Iran et Israël ont profondément désorganisé le trafic aérien mondial. Annulations massives, détournements de vols, allongement des trajets, les compagnies aériennes paient le prix fort de cette nouvelle escalade militaire.

    Depuis les frappes israéliennes du 13 juin, le ciel au-dessus de l’Iran et d’une grande partie du Golfe reste déserté. Selon le site Flightradar24, plus de 3 000 vols sont annulés chaque jour dans la région. Et pour ceux qui décollent malgré tout, les itinéraires sont systématiquement modifiés pour éviter la zone. Ces détournements provoquent une hausse des coûts d’exploitation. La raison s'explique par la consommation supplémentaire de carburant, les contraintes liées au temps de travail des équipages et la nécessité de faire escale pour changer de personnel. À cela, ajoutez les retards en cascade qui désorganisent les plannings et la rotation des appareils, habituellement réglée à la minute près.

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    Hubs paralysés et corridors aériens saturés

    À ces coûts s'ajoute un autre facteur : la fermeture temporaire de grands aéroports comme ceux de Dubaï ou Tel-Aviv, qui sont de véritables plaques tournantes du transport international. Leur mise à l’arrêt perturbe l’ensemble du secteur, y compris pour les compagnies américaines, asiatiques et européennes, qui y font transiter vols et passagers. La marge de manœuvre est d’autant plus réduite que l’espace aérien ukrainien est interdit depuis plus de trois ans. Résultat : les couloirs aériens entre l’Europe, l’Asie et l’Afrique de l’Est deviennent de plus en plus étroits, ce qui complexifie la logistique du secteur.

    Les marchés réagissent, les passagers paieront

    Sans surprise, les marchés financiers ont immédiatement réagi. Les actions d’Air France-KLM, Delta ou United ont chuté d’environ 5 % après l'annonce des frappes israéliennes. Et si les compagnies du Golfe sont évidemment touchées, la crise touche désormais l'ensemble du transport aérien mondial. Pour faire face à la situation, le Parlement israélien a étendu une garantie d’État de 8 milliards de dollars aux compagnies étrangères, dans le cadre d’une assurance contre les risques de guerre. Cette mesure s’ajoute aux 6 milliards déjà validés depuis octobre 2023. Mais même avec ce soutien, une hausse des tarifs semble inévitable, en particulier sur les longues distances. Car si la sécurité des passagers reste la priorité, son coût, lui, ne cesse d’augmenter.

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  • Défense: les milliards d'euros de l’Union européenne attirent les géants étrangers
    Jun 24 2025

    Le sommet de l’Otan s’ouvre ce mardi dans un contexte particulièrement sensible. Guerre en Ukraine, incertitudes sur l’engagement des États-Unis, et réarmement massif en Europe. Ce réarmement transforme en profondeur l’industrie militaire du continent, entre financements européens, alliances internationales et enjeux de souveraineté.

    Les États membres de l’Union européenne accélèrent leur réarmement, et cela implique des financements massifs. Pour les accompagner, deux programmes se démarquent. Le plus important, ReArm Europe, prévoit jusqu’à 800 milliards d’euros de dépenses nationales supplémentaires dans la défense d’ici 2030. À côté, l’EDIP (Programme européen pour l’industrie de défense) mobilise 1,5 milliard d’euros sur la période 2025-2027. L’objectif : renforcer la compétitivité de la base industrielle et technologique de défense européenne. La conséquence est bien là, le marché européen de la défense est en pleine expansion.

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    Alliances entre industriels européens et étrangers

    Depuis l’invasion russe de l’Ukraine en 2022, les budgets militaires européens ont fortement augmenté. L’industrie de l’armement y voit une opportunité de croissance. Tandis que les États cherchent des fonds pour se réarmer, les industriels européens multiplient les partenariats avec leurs homologues non-européens. Parmi les exemples récents, l’alliance entre l’Allemand Rheinmetall et l’Américain Anduril Industries, ou encore entre l’Italien Leonardo et le Turc Baykar. Ces alliances permettent aux entreprises européennes d’élargir leur offre, d’accéder à des technologies extérieures, de partager les coûts de développement et d’accélérer la mise sur le marché. Pour les acteurs non-européens, c’est une manière de pénétrer le marché européen et de contourner certaines restrictions liées à la préférence européenne, alors que l’UE importe encore entre 60 et 80 % de son matériel militaire.

    Des inquiétudes sur la souveraineté industrielle

    Mais ces rapprochements ne sont pas sans susciter des craintes. En particulier sur la question de l’autonomie stratégique européenne et des risques de dépendance technologique. Certains industriels, notamment en France, s’inquiètent de l’arrivée de concurrents extérieurs sur le marché européen et du risque que des fonds européens financent des productions sous licence étrangère. Alors que Paris freine, Berlin avance. L’Allemagne, avec son champion Rheinmetall, incarne cette nouvelle dynamique industrielle. Sans attendre ses partenaires, elle trace sa voie pour répondre à ses propres objectifs. Une tendance qui s’inscrit dans la relance plus large de l’industrie militaire sur le continent.

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  • États-Unis: une loi historique pour encadrer les cryptomonnaies
    Jun 20 2025

    Retour sur ce vote historique aux États-Unis. Le Sénat a adopté cette semaine, et pour la première fois, un texte régulant les stablecoins. Les stablecoins, ce sont des cryptomonnaies adossées à une devise ordinaire. Ce vote est considéré comme une étape importante pour le développement de cet actif.

    Avant tout, un petit point de vocabulaire. Alors une stablecoin c'est quoi ? C'est une cryptomonnaie dont la valeur ne varie presque pas, elle reste stable, d'où cette appellation « stablecoin », « une pièce de monnaie stable » si l'on traduit en français. Mais la particularité de cette monnaie virtuelle, d'où sa stabilité, c'est qu'elle est adossée à une devise traditionnelle, le plus souvent le dollar américain. Concrètement, si vous détenez un jeton de stablecoin, vous détenez un dollar. Chaque jeton étant censé être couvert par un vrai dollar ou un actif très sûr.

    Quel intérêt d'avoir un stablecoin ?

    En fait cette cryptomonnaie facilite les échanges. Elle permet d'acheter, de vendre, d'envoyer de l'argent à l'autre bout du monde en quelques secondes, 24h/24h, et c'est important, sans passer par une banque. C'est donc rapide, gratuit, car il n'y a pas de taux de change ni de frais bancaires étant donné qu'on paie et qu'on achète en cryptomonnaie.

    C'est une valeur sûre, donc pour les entreprises, c'est un outil pour réduire leurs coûts de paiement à l'international. D'ailleurs, Amazon ou Walmart envisagent de lancer leurs propres stablecoins. Et pour les particuliers, c'est plus anecdotique mais c'est une façon de protéger leurs économies contre l'inflation ou les crises bancaires.

    Un marché stratégique désormais encadré aux États-Unis

    Aujourd'hui, les stablecoins constituent un marché colossal de 250 milliards de dollars. Et la croissance de ces stablecoins est fulgurante. Il y a à peine cinq ans, cela représentait seulement 20 milliards de dollars. Huit transactions sur dix en cryptomonnaies passent par elles. Et plus impressionnant encore, d'après la Deutsche Bank, leur volume de transaction a dépassé l'année dernière ceux de Visa et de Mastercard réunis.

    Un intérêt croissant des banques, géants de la tech et États

    Notamment avec cette régulation aux États-Unis. Puisqu'il faut voir un peu plus loin que la simple transaction. Comme les stablecoins sont généralement basés sur le dollars, et bien ça renforce la domination américaine dans le commerce mondial, domination du dollar même. Et à l'heure où différentes économies entendent s'éloigner du billet vert, cette étape revêt une importance stratégique pour les États-Unis.

    Mais attention, ce n'est pas sans risque. Les stablecoins sont aussi utilisées pour des activités illégales comme le blanchiment d'argent ou le financement du crime organisé. Et si tout le monde se met à utiliser ces stablecoins au lieu des banques, ça pourrait fragiliser le système financier actuel. C'est précisément pour ces raisons que le Sénat américain a voté cette loi qui impose un cadre clair à cette cryptomonnaie. Avec un double objectif : protéger les consommateurs, et renforcer la place du dollar dans l'économie numérique mondiale.

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  • Pour relancer l’investissement en Europe, Bruxelles mise sur la titrisation
    Jun 19 2025

    Pour stimuler l’investissement au sein de l’Union européenne, la Commission européenne souhaite relancer un outil financier longtemps associé à la crise de 2008 : la titrisation. En simplifiant son usage tout en l’encadrant strictement, Bruxelles espère libérer des fonds pour financer l’innovation, la transition écologique, la sécurité ou encore la défense.

    Soyons honnêtes, le terme peut faire peur. Titrisation. Mais derrière ce mot se cache une technique financière visant à convertir des actifs – le plus souvent des prêts bancaires – en titres négociables sur les marchés. Concrètement, une banque qui a accordé de nombreux prêts peut les regrouper, les transformer en titres financiers, puis les vendre à des investisseurs. Cela lui permet de récupérer immédiatement des liquidités pour accorder de nouveaux crédits. Pour « imager » ce processus, on peut le comparer à un particulier qui aurait prêté de l’argent à plusieurs amis. Au lieu d’attendre que chacun rembourse petit à petit, il revend l’ensemble de ces dettes à un tiers qui encaissera les remboursements à sa place. C’est ce mécanisme que Bruxelles souhaite remettre au goût du jour pour fluidifier le crédit.

    Un levier pour financer les besoins colossaux de l’UE

    Si la titrisation est en passe d'être relancée, c'est parce qu’elle permet aux banques de libérer du capital, de prêter davantage, et donc de soutenir la croissance. C’est précisément ce que cherche la Commission européenne, qui estime que l’Union a besoin de plus de 800 milliards d’euros par an pour financer l’innovation et la transition écologique, sans compter les besoins en matière de sécurité et de défense. En facilitant la titrisation, l’objectif est de mieux mobiliser l’épargne européenne – estimée à 35 000 milliards d’euros – et de rediriger cet argent vers des investissements productifs, notamment au bénéfice des PME. Bruxelles envisage ainsi de bâtir un véritable marché européen des capitaux, à l’échelle du continent et non plus cloisonné par pays.

    Un outil à double tranchant, à encadrer strictement

    Mais relancer la titrisation, c’est aussi raviver les souvenirs de la crise financière de 2008. À l’époque, des titres adossés à des prêts à haut risque (notamment immobiliers) avaient été massivement vendus à des investisseurs avant que ces derniers ne cessent d’être remboursés, entraînant une crise mondiale. Bruxelles avance donc avec prudence. Le cadre envisagé prévoit une réglementation stricte, afin d’éviter toute dérive. Il s’agit de restaurer la confiance des investisseurs tout en garantissant la stabilité financière. Dans un contexte où certains capitaux se détournent du marché américain, l’Union européenne espère ainsi devenir une alternative crédible pour les investissements, en offrant des titres à la fois sûrs et attractifs.

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  • Investissements étrangers: la Banque mondiale alerte sur une chute historique dans les pays en développement
    Jun 18 2025

    La Banque mondiale alerte sur un recul historique des investissements directs étrangers dans les pays émergents. L’Afrique n’est pas épargnée, avec des chutes marquées en Égypte, en Angola ou en Afrique centrale. Un phénomène inquiétant qui menace la croissance et les infrastructures. Décryptage.

    Les investissements directs étrangers (IDE) vers les pays émergents et en développement ont atteint en 2023 leur plus bas niveau depuis 2005. C’est le constat dressé par la Banque mondiale dans son dernier rapport. Ces flux de capitaux — injectés par des entreprises pour implanter usines, services ou projets — se sont limités à 435 milliards de dollars l’an dernier, soit à peine 2 % du PIB de ces pays. Un effondrement spectaculaire quand on sait qu’ils représentaient plus de 5 % du PIB en 2008. La tendance n’épargne pas les économies plus avancées, mais elle frappe avec particulièrement les pays en développement, qui dépendent fortement de ces flux pour financer leur croissance, leurs infrastructures ou leur transition énergétique.

    L’Afrique, première victime de la chute

    Le continent africain illustre à lui seul cette dynamique globale. L’Afrique du Nord a vu ses IDE chuter de 12 % en 2023, et l’Afrique centrale de 17 %. L’Égypte, longtemps l’un des plus gros récipiendaires d’IDE sur le continent, a connu une baisse brutale après un pic en 2022. Et l’Angola affiche un signal encore plus inquiétant : les flux d’IDE y sont devenus négatifs, c’est-à-dire que les filiales étrangères retirent plus de capitaux qu’elles n’en investissent. Malgré ce tableau sombre, quelques exceptions subsistent. La Mauritanie, par exemple, continue d’attirer de grands projets liés à l’hydrogène vert. Mais ce sont des cas isolés dans un contexte global de désengagement.

    Des causes multiples : incertitude, dette et inertie politique

    Pourquoi une telle désaffection ? La Banque mondiale identifie plusieurs freins majeurs. D’abord, l’incertitude géopolitique, qui a atteint son niveau le plus élevé depuis le début du siècle, refroidit considérablement les investisseurs. Ensuite, la montée du protectionnisme sape les fondements du commerce international. À cela s’ajoute la dette publique élevée dans de nombreux pays en développement, qui réduit la marge de manœuvre pour accueillir et sécuriser des investissements. Enfin, la stagnation des réformes structurelles dans plusieurs économies émergentes empêche toute amélioration durable du climat des affaires.

    Face à ces défis, la Banque mondiale propose une série de recommandations. Premièrement, améliorer le climat des affaires et lever les obstacles réglementaires afin de restaurer l’attractivité des pays concernés. Deuxièmement, favoriser les projets qui génèrent une forte valeur ajoutée locale et de l’emploi. Mais surtout, l’institution insiste sur la nécessité de renforcer la coopération internationale : relancer les traités commerciaux, réduire les barrières aux échanges et accompagner les réformes à travers une aide technique et financière. Car derrière ces flux de capitaux, il y a plus qu’un enjeu économique. Attirer les investissements, c’est donner une chance au développement, à la transition énergétique, et à la stabilité sociale de ces pays.

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  • La France peut-elle rattraper son retard dans le secteur spatial?
    Jun 17 2025

    Alors que s’ouvre le Salon international de l’aéronautique et de l’espace du Bourget, la puissance spatiale française et européenne montre des signes de décrochage. Moins de lancements, moins de financements et une dépendance croissante aux technologies étrangères. Une situation critique à l’heure où l’espace devient un enjeu économique et de souveraineté majeur.

    Comme souvent, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Selon un rapport de l’Institut Montaigne, l’Europe ne représente plus que 5% de la masse orbitale mondiale lancée chaque année. Pis encore, elle investit six fois moins que les États-Unis dans ce domaine stratégique. Ce recul est d’autant plus saisissant qu’il y a quinze ans à peine, l’Europe visait le leadership global sur l’ensemble des compétences spatiales.

    Aujourd’hui, elle subit de plein fouet la domination américaine, incarnée notamment par SpaceX, qui a réalisé 138 des 145 lancements américains en 2024 grâce à ses fusées réutilisables. L’Europe, elle, n’a enregistré que trois tirs, en raison du retrait d’Ariane 5, du retard d’Ariane 6 tout comme de sa petite sœur Vega-C et de la perte de l’accès aux fusées Soyouz.

    La France, un moteur fragilisé de l’espace européen

    Au sein de l’Europe, la France voit son rôle moteur mis à mal. Malgré sa place de premier contributeur, avec l’Allemagne, à l’Agence spatiale européenne (ESA), elle est confrontée à de multiples retards dans des domaines clés, notamment militaires.

    Cette lenteur renforce sa dépendance aux systèmes américains : GPS pour la navigation, Starlink pour la connectivité. Certes, des alternatives européennes existent, comme Galileo ou One Web, mais leur déploiement est encore trop lent. Le marché spatial mondial, singulièrement celui des constellations de satellites, connaît une croissance fulgurante de 4,3 milliards de dollars en 2024 à 27,3 milliards attendus d'ici à 2032. Or, dans ce secteur d’avenir, les acteurs français peinent à s’imposer face aux géants américains et chinois.

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    Une industrie stratégique en quête de souveraineté

    L’enjeu n’est pas seulement technologique, il est aussi économique et géopolitique. L’industrie spatiale française représentait 70 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023, et elle contribue positivement à la balance commerciale du pays. C’est pourquoi le gouvernement s’apprête à dévoiler une nouvelle stratégie spatiale nationale. Cette stratégie vise à soutenir les industriels, stimuler l’innovation et renforcer l’autonomie stratégique de la France. Car si le pays dispose d’atouts majeurs – base industrielle solide, excellence scientifique, expertise reconnue –, son avenir spatial dépendra aussi de la capacité de l’Europe à retrouver une dynamique collective, malgré les turbulences qu’elle traverse.

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