On termine cette série consacrée aux crabes et la saison 4 de PPDP avec la plus noble famille de crustacés : les crabes royaux, ou Lithodidae (des...faux crabes bien sûr !) .

Focus tout particulier dans cet épisode sur une altesse sibérienne, le crabe royal du Kamchatka, un soleil rouge aux rayons pouvant atteindre les 3.5 m d'envergure...

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📖Si cet épisode t'a passionné.e, d'autres pépites t'attendent dans le livre de Marc Mortelmans, Nomen, l'origine des noms des espèces (Ulmer 2024) et En finir avec les idées fausses sur le monde Vivant (Éditions de l'atelier 2024).

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Interview : Marc Mortelmans

Invité : Corentin Garde, responsable de la pédagogie à l'Aquarium de Paris

Montage, vignette et mise en ligne : Marie-Juliette Champeau

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Le Yéti ? Ça n'existe pas voyons ! Du moins, c'est ce que l'on croyait jusqu'en 2005, année de découverte à plus de 1500 km au sud de l'île de Pâques de Kiwa hirsuta, un imposant "faux crabe" longiligne, blanc, et surtout...poilu.

Bien que loin d'être abominable et encore moins des neiges, Kiwa hirsuta (littéralement : "hirsute divinité maorie de l'océan") possède donc à l'instar du Yéti une "fourrure" abondante, en particulier au niveau de la première paire de pattes (celle qui porte les pinces). Cet accoutrement est en réalité un ensemble de soies lui permettant d'accumuler des bactéries afin de s'en délecter ou de les utiliser comme détoxifiants des alentours. En effet, en plus de l'aspect touffu, Kiwa hirsuta partage avec le monstre himalayen un goût pour les milieux extrêmes : il vit à plusieurs centaines de mètres de profondeur, dans le noir complet, au niveau des cheminées hydrothermales, des édifices sous-marins bouillonnants émetteurs entre autres de gaz toxiques. Beaucoup de femelles succombent d'ailleurs à cause de cet environnement dangereux : quand elles pondent, elles s'élèvent légèrement par rapport au plancher océanique afin de disperser leurs larves, ce qui peut les entraîner dans le tourbillon brûlant des cheminées qui les pulvérisent.

La dangerosité de leur milieu fait que les Crabes yéti sont benthiques et très généralement inféodés à leur lieu de naissance. Ceci entraîne un isolement génétique considérable des populations, ce qui augmente la spéciation (la transformation en espèces différentes). Parmi les espèces découvertes depuis 2005, la palme du nom le plus insolite revient à Kiwa puravida, nommée en l'honneur de son pays d'origine, le Costa Rica (pura vida = "vie pure" en espagnol, locution quotidienne notamment utilisée pour saluer). Un comble pour un animal prisonnier d'un habitat aussi hostile !

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Après avoir présenté une florilège de vrais crabes, attaquons-nous au plus gros et plus lourd arthropode du monde : le Crabe des cocotiers, alias Birgus latro.

Cet étrange golgoth peut vivre 30 ans, et pèse jusqu’à 4 kilos, pour une envergure pouvant dépasser le mètre. Il soulève en outre 28 kilos à l’épaulé-jeté et peut casser des noix de coco avec ses pinces! d'où son nom. Jusque-là tout va bien. De fait, il est mal nommé: ce n’est pas un crabe, ce géant appartient plutôt à la famille du bernard-l’hermite.

L’espèce la plus courante de ce groupe est le pagure commun, Pagurus bernhardus. Son nom vient du grec pagouros, « queue enfoncée, ajustée [dans une coquille]». Comme vous le savez, ce crustacé rigolo protège son abdomen mou dans une coquille. Et au fur et à mesure qu'il grandit, il doit changer de maison. Parfois, des déménagements en série se produisent: des « chaînes de vacances » se forment, où ces crustacés s’échangent leurs « maisons » à la queue leu leu.

Et c'est dans ce besoin de protéger son abdomen mou qu'on trouve une preuve de la parenté entre les bernards l'hermitte et les crabes de cocotiers. Leurs juvéniles protègent eux aussi leur petit bidon tout mou, parfois avec des morceaux de noix de coco.

Mais au fil du temps, cette partie molle finit par durcir et se recroqueviller sous leur corps, comme leurs cousins du groupe « d’en face », les crabes « vrais », alias Brachyoures, les « queues courtes », comme les tourteaux ou ceux que nous voyons buller ou avancer en travers sur les rochers.

Les membres de la famille de ce géant terrestre, comme les pagures, les galathées, les crabes royaux et les crabes porcelaine, sont quant à eux regroupés sous la bannière des Anomoures, les « queues… différentes, anormales ».

Le nom scientifique du crabe des cocotiers est somptueux: dans Birgus latro, latro signifie « voleur ». Notre coco des îles est en effet un chapardeur: il vole parfois la vaisselle sale dans les cuisines humaines pour s’en pourlécher les babines articulées.

Un de ses noms allemands est d’ailleurs Palmendieb, le « voleur des palmiers ». Nos compatriotes polynésiens le savent, ils n'ont pas intérêt à trop procrastiner sur leur vaisselle!

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