• 2025, Israël et les fronts multiples
    Jan 10 2025
    Dans le sillon de la réponse aux attentats du 7 octobre 2023 en Israël, l’État hébreu multiplie les offensives au Proche-Orient contre la nébuleuse iranienne de l’« Axe de la résistance ». Les évènements en Syrie ne semblent pas faire changer de cap le Premier ministre israélien, qui poursuit une ligne résolument pro-guerre. Tout d’abord, c’est en raison d’un profond sentiment de surpuissance militaire, largement incarnée par le Premier ministre va-t-en-guerre Benyamin Netanyahu, qu’Israël continue de foncer, tête baissée, sur ses ennemis proches et lointains avec l’aide soutenue de Washington. « LaSyrie n’est plus la même Syrie, le Liban n’est plus le même Liban, a récemment martelé Benyamin Netanyahu, ajoutant : Gaza n’est plus la même Gaza et même l’Iran a, lui aussi, ressenti la puissance de notre bras. » Il faut dire que la réponse israélienne aux attaques du Hamas a produit une impressionnante tectonique des plaques de la géopolitique du Proche-Orient — impensable il y a encore quelques mois — résultat d’offensives militaires qui ont de quoi donner raison à un chef de gouvernement qui affirme combattre sur sept fronts simultanés.Les branches armées et politiques du Hamas et du Jihad islamique à Gaza sont décimées, bien que non vaincues, alors que l’enclave palestinienne a été transformée en charnier à ciel ouvert après 15 mois de bombardements d’une violence inégalée. Au Liban, la milice chiite du Hezbollah, pourtant redoutée, a été défaite en quelques semaines de combats, sa direction politique et opérationnelle anéantie au prix de centaines de morts civils et de sérieux doutes persistent sur les intentions israéliennes — mettre fin, ou non, à l’occupation de fait du Sud-Liban — quand le cessez-le-feu de soixante jours expirera le 27 janvier prochain. À lire aussi Bande de Gaza : 365 km — anéantis par Israël en 365 jours, « une volonté de détruire une mémoire »Le revers historique de l’« Axe de la résistance » pro-iranien offre pour Benyamin Netanyahu une porte de sortie personnelle inespéréeCette fuite en avant à marche forcée et les succès indéniables du Premier ministre israélien sont évidemment politiquement opportuns, lui permettant de se maintenir au pouvoir. Mais ce maintien se fait dans un équilibre instable, alors qu’une partie de l’opinion publique lui reproche une guerre sans but et sans fin et de ne pas avoir tout fait pour libérer les otages encore retenus à Gaza. En outre, sa responsabilité dans la faille sécuritaire qui a permis les massacres du 7-Octobre n’a toujours pu être établie, faute de la formation d’une commission d’enquête. Sur le plan juridique aussi, Benyamin Netanyahu est poursuivi pour corruption, fraude et abus de confiance et son procès a constamment été repoussé à cause d’un conflit auquel il n’a donc aucun intérêt à mettre fin. À lire aussi Israël-Gaza : 7 octobre 2023, le jour où une nouvelle guerre a débutéPeut-on parler de victoire définitive et irréversible ? Nombreux sont les experts qui estiment que le chef du gouvernement israélien serait tenté par reconfigurer le Moyen-Orient dans une sorte de « pax israeliana » — une paix sous domination israélienne — profitant des flottements politiques de l’après-Bachar dans la Syrie voisine, de la perte d’influence de l’Iran et ses affidés, et de l’abandon total de toute tentative de résolution de la problématique palestinienne.Reste que la région, dont l’imprévisibilité et la complexité sont proverbiales, regorge d’éléments déstabilisateurs comme, par exemple, les rebelles houthis du nord-Yémen qui multiplient les attaques contre Israël et perturbent dangereusement le trafic maritime en mer Rouge.Quoi qu’il en soit, l’année 2025 sera aussi celle du retour de Donald Trump à la Maison Blanche et Benyamin Netanyahu, son meilleur allié, sait parfaitement que cela sera sans doute providentiel pour le destin expansionniste d’Israël et donc du sien. À lire aussiLes attaques des rebelles houthis du Yémen, un véritable casse-tête pour la défense israélienne
    Show more Show less
    3 mins
  • Birmanie: 2025, année de tous les dangers pour la junte?
    Dec 27 2024

    Presque quatre ans après le coup d'État militaire qui a renversé le gouvernement élu, ce grand pays d'Asie orientale sombre dans la guerre civile, le chaos social et l'une des pires crises humanitaires de son histoire. Pourtant, les insurrections armées progressent. Cyril Payen, peut-on, d'ores-et-déjà, parler d'un tournant ?

    Ce qui est certain, c'est que la longue marche vers la victoire contre la dictature militaire a commencé avec, pour horizon, l'année 2025. Organisée et structurée, l'opposition pro-démocratique civile et armée opère une montée en puissance qui semble de plus en plus implacable, et ce aux quatre coins de cet immense territoire, carrefour entre l'Asie du Sud-Est et l'Inde.

    Le pouvoir central perd du terrain

    Selon le gouvernement parallèle, né clandestinement après le coup d'État de février 2021, près des deux tiers du pays ne sont plus contrôlés par le pouvoir central, alors que régions et garnisons militaires tombent une à une, du lointain état d'Arakan à la frontière, du Bangladesh aux sanctuaires de la guérilla kachin aux confins du Triangle d'Or, sans oublier les traditionnels bastions karens, plein est, sur la frontière thaïlandaise où, symbole parmi les symboles, l'ancien quartier général de Manerplaw, tombé en 1994, a été repris cette semaine.

    Signe des temps : un an après être officiellement passé d'une tactique de guérilla à une offensive conventionnelle tous azimuts, une grande partie des responsables du NUG, le Gouvernement d'union nationale, a annoncé sortir de la clandestinité pour rejoindre la Birmanie dès janvier 2025.

    À lire aussiBirmanie: la junte militaire au pouvoir continue de subir les revers des groupes rebelles

    Une grande fébrilité dans la junte militaire et chez ses alliés

    Du côté de la Tatmadaw, l'armée birmane, il y a bien entendu les pertes, de plus en plus importantes, qui permettent aux rebelles de se constituer d'impressionnants arsenaux, mais il y a aussi les défections. Sentant le vent tourner ou écœurés par les méthodes d'une armée souvent accusée d'être en guerre contre sa propre population, des milliers de soldats sont passés dans le camp des rebelles, et de vastes purges ont eu lieu au sein d'un état-major que l'on sait infiltré par les insurgés.

    Plus isolés que jamais, les chefs de la junte birmane ne survivent que grâce à leurs parrains chinois, russes ou nord-coréens, pour ne citer que les plus visibles, l'indifférence coupable de la communauté internationale faisant le reste. Mais là aussi, la nervosité du gouvernement chinois face à l'instabilité chez le voisin birman, ou les déboires de Moscou au Proche-Orient, pourraient faire changer les orientations de cette guerre par procuration asiatique.

    À lire aussiBirmanie: l'impossible démocratie

    Le chef de l'armée putschiste dans le collimateur de la CPI

    Les soucis, c'est bien connu, volant souvent en escadrille, le karma politique du chef de la junte militaire s'est encore un peu plus assombri le 27 novembre 2024, à des milliers de kilomètres de son bunker de Naypidaw, à La Haye où siège la Cour pénale internationale.

    Premier mandat d'arrêt requis par le procureur : le vieux dossier du massacre de la minorité musulmane des rohingyas est exhumé. Le général Min Aung Hlaing y est accusé de crimes, de déportation et de persécutions, des actes qualifiés de crimes contre l'humanité. Les premières audiences pourraient avoir lieu en 2025. Une année donc décisive pour le destin pro-démocratique de la Birmanie.

    À lire aussiBirmanie, le rêve d'une union fédérale gagne du terrain

    Show more Show less
    3 mins
  • Changement de cap politique imminent en Allemagne?
    Dec 20 2024

    Après la décision lundi 16 décembre du chancelier Olaf Scholz d’affronter un vote de défiance au Bundestag, le Parlement allemand, il chamboule la situation politique de l'Allemagne. Il provoque la chute de son gouvernement, la dissolution du Bundestag et la convocation d’élections générales anticipées le 23 février prochain. Doit-on s’attendre à un changement de cap en Allemagne ?

    À en croire les enquêtes d’opinion actuelles, la situation politique enAllemagne pourrait probablement changer. Selon ces sondages, c’est la CDU, le parti chrétien démocrate dirigé aujourd’hui par Friedrich Merz qui fait la course en tête, crédité de 30 à 32 % des voix. Loin devant le SPD, les sociaux-démocrates du chancelier sortant Olaf Scholz, qui obtiendraient environ 15 % des voix. La formation d’extrême droite AfD est annoncée avec un score autour des 20 %. On assiste donc à la fin de la coalition SPD / Verts / Libéraux menée par Olaf Scholz, et la victoire semble à ce stade en vue pour Friedrich Merz.

    À lire aussiAllemagne: la droite désigne l’ultraconservateur Friedrich Merz candidat à la chancellerie en 2025

    Un dirigeant qui revient de loin ?

    Le parcours et l’histoire de Friedrich Merz sont assez incroyables. Élu dès 1994 au Bundestag, il a vite vu son ascension stoppée par une certaine Angela Merkel, qui lui ravit en 2002 la présidence du groupe parlementaire de la CDU. Il se fait discret jusqu’en 2009, date à laquelle il quitte la politique pour redevenir avocat d’affaires. Ce n’est qu’en 2018 qu’il revient dans le jeu, quand Madame Merkel annonce son retrait qui prend date en 2021. Friedrich Merz est donc débarrassé du fantôme de sa plus tenace adversaire et prend les rênes de son parti. À 69 ans, il pense que son heure est enfin arrivée.

    Un programme libéral en économie et conservateur sur les questions sociétales

    Friedrich Merz accuse Olaf Scholz d’avoir raté sa chance au cours des trois dernières années et entend appliquer, s’il est élu, un programme libéral très orthodoxe. Respect du « frein à la dette », inscrit dans la Constitution, baisses d’impôts, allègement des droits de succession... Il veut aussi mettre fin au programme de remplacement des chaudières au gaz ou au fioul, entamé par l’actuel gouvernement pour lutter contre le réchauffement climatique, et qui fait l’objet d’un débat passionné outre-Rhin. Un programme à l’opposé de celui de son adversaire Scholz, alors que l’Allemagne traverse une vraie crise économique et risque d’être en récession pour la deuxième année consécutive, avec son secteur à l’exportation en difficulté notamment dans le secteur de l’industrie automobile, on pense notamment à Volkswagen. Conservateur sur les questions de société, il veut par exemple abolir la loi sur la légalisation du cannabis, adoptée par la majorité sortante.

    Olaf Scholz, un candidat combatif

    Le chancelier reste combatif et a été désigné comme le candidat du SPD. Il part certes avec un lourd handicap, mais cela ne lui fait pas peur. En 2021, déjà, on le donnait perdant, et il avait remporté le scrutin. La grande question sera celle de la coalition. Nous n’y sommes pas encore. Le choix que feront les Allemands, un mois après l’investiture de Donald Trump, en pleine guerre en Ukraine, aura bien sûr des conséquences importantes pour l’Europe et notamment la France.

    À écouter dans Décryptage Économie, politique: la fin du modèle allemand?

    Show more Show less
    3 mins
  • La Turquie et les Kurdes, un danger pour la Syrie?
    Dec 13 2024

    Après la chute de Bachar el-Assad en Syrie dimanche 8 décembre, la situation est très incertaine dans le pays. Et une question préoccupe : celle du rapport de force entre les forces Kurdes et les rebelles pro-turcs.

    Il faut d’abord rappeler que les Kurdes contrôlent environ un tiers du territoire syrien au nord-est du pays. Dans cette région riche en ressources pétrolières, les FDS (Forces démocratiques syriennes), c'est-à-dire les forces kurdes pour faire simple, ont instauré un gouvernement en totale autonomie par rapport au pouvoir central.

    Dans cette zone, ils ont établi une administration qui garantit la liberté religieuse, qui garantit les droits des femmes et qui gère aussi la détention de milliers de détenus jihadistes, en grande partie issus de l’organisation État islamique. C’est une des raisons essentielles pour laquelle les Kurdes sont alliés des Occidentaux, en particulier des Américains, présents dans cette zone, et du coup protégés par eux.

    Les Kurdes ont des alliés, mais ils ont aussi un ennemi de taille, la Turquie

    Pour Ankara, les Kurdes de Syrie sont des soutiens indéfectibles des Kurdes de Turquie, notamment du PKK, l’organisation considérée comme terroriste par Ankara qui estime qu’elle représente une menace existentielle sur l’unité de la Turquie. C’est pourquoi Ankara soutient, finance et équipe des forces pro-turques en Syrie, l’ANS, l’Armée nationale syrienne. L’ANS détient une partie du nord de la Syrie.

    L’objectif du président Erdogan, qui n’est pas nouveau, est de tout faire pour que l’ANS contrôle les 930 km de frontière commune entre la Turquie et la Syrie, pour couper en deux l’alliance entre Kurdes de Turquie et de Syrie. Un objectif qui pourrait pousser le dirigeant turc à profiter de la nouvelle situation en Turquie pour mettre fin à l’autonomie kurde en Syrie.

    À écouter Syrie : « La région kurde est très largement menacée par la Turquie »

    Les Européens et les Américains inquiets

    Le secrétaire d’État américain Antony Blinken s’est rendu à Ankara pour convaincre Recep Tayyip Erdogan de limiter ses actions en Syrie. Les États-Unis tentent de jouer les médiateurs pour obtenir un cessez-le-feu entre forces kurdes et pro-turques dans le nord du pays. Les affrontements entre les deux parties ont déjà fait plus de 200 morts autour de la localité de Manbij, tombée aux mains des rebelles pro-turcs, qui ont aussi pris le contrôle de la ville de Deir Ezzor.

    Les Occidentaux redoutent qu’Erdogan, en position de force, veuille pousser son avantage pour s’emparer de villes kurdes qui sont des symboles de la lutte contre l’organisation État islamique, comme Kobané, au nord-est de la Syrie.

    La grande crainte, c’est donc qu’Erdogan démantèle totalement l’ensemble de l’administration autonome kurde en Syrie. Et qu’il les remplace par le Conseil national kurde, une instance kurde syrienne proche du parti du Kurdistan d’Irak (PDK) qui entretient de bonnes relations avec Ankara. Des plans qui pourraient compromettre dangereusement une transition pacifique en Syrie.

    À lire aussiLe risque de morcellement plane sur la Syrie post-Assad

    Show more Show less
    3 mins
  • Crise politique en France: le président Emmanuel Macron est-il désavoué à l’étranger?
    Dec 6 2024

    La motion de censure contre le gouvernement de Michel Barnier a placé la France dans une période politique d'une rare incertitude. Et cette instabilité politique n'épargne pas l'image du président de la République sur la scène internationale.

    On peut sans doute parler d’une forme de dépit envers Emmanuel Macron, déjà présent et qui est fortement accentué par l’actuelle crise politique en France. Un dépit, à l’aune de ce qu’il a longtemps incarné à l’étranger, depuis sa première élection en 2017 : un président jeune, dynamique, capable de transformer et de moderniser la France et désireux de relancer l’Europe. Il incarnait aussi beaucoup d’espoirs et avait, dans un premier temps, revitalisée l'image de la France sur la scène internationale.

    Mais avec le temps et les différentes crises qui se sont succédé, la pratique macronienne et le comportement personnel du président ont quelque peu désarçonné certains de ses interlocuteurs en Europe et ailleurs. Mais on saluait aussi le volontarisme et la volonté de faire du chef de l’État.

    Une situation qui fragilise le président et le pays

    La France reste, malgré tout, une puissance qui compte sur la scène internationale et notamment en Europe. Et une France fragilisée en interne, politiquement et économiquement, a des conséquences, en particulier au sein de la zone euro. Et en Europe plus largement, avec une Allemagne en proie, elle aussi, à une incertitude politique avec des élections convoquées en février prochain, un « moteur » franco-allemand qui tousse, ce qui n’est jamais bon.

    Plus généralement, ce qui inquiète à l’étranger, c’est que jusqu’ici la France était considérée, grâce aux institutions de la Ve République, comme un pays stable. C’est ce statut qui s’est sérieusement effrité depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en juin dernier et tout ce qui a suivi. Cela donne la sensation d’un pays hésitant et profondément divisé avec un président à mi-chemin entre orgueil et déni de la réalité de la situation.

    Certains sont tentés d’en profiter. On peut penser à la Russie ou aux États-Unis qui, pour des raisons différentes, ne sont pas mécontents de voir les deux principales puissances du Vieux Continent en proie aux difficultés.

    Et les problèmes peuvent aussi venir d’alliés présumés. C’est ainsi qu'Ursula Von der Leyen s’est rendue en Uruguay au sommet du Mercosur. Pour annoncer que la signature finale de l’Union européenne sur ce traité, refusé en l’état par la France, est proche.

    Seule consolation pour Emmanuel Macron : il a, sur ce dossier au moins, le soutien de l’ensemble de la classe politique française. Ce n’est pas la fin de l’histoire, puisque même une signature d'Ursula Von der Leyen ne suffit pas pour que le traité soit appliqué. Mais le combat de la France pour rallier d’autres pays à sa position et dégager une minorité de blocage sur ce dossier s’annonce encore plus compliqué, même si la Pologne, l’Italie et l’Autriche sont proches des positions françaises. Comme l’a dit Michel Barnier devant les députés : pour la France, et donc pour Emmanuel Macron, tout sera désormais plus difficile.

    À lire aussiGouvernement en France: ces noms qui circulent pour remplacer Michel Barnier à Matignon

    Show more Show less
    3 mins
  • Ukraine, deux mois à venir dangereux?
    Nov 22 2024

    Entre la Russie de Vladimir Poutine, l’Ukraine et ses alliés occidentaux, les tensions montent. Doit-on craindre un embrasement en Ukraine dans les semaines à venir ?

    Deux facteurs rendent la situation actuelle particulièrement volatile. D’abord, on est presque à trois ans de guerre et il y a une forme de fatigue de part et d’autre. Côté russe, même si la dynamique est favorable depuis le printemps, elle n’est pas non plus décisive. Certes, les avancées se font plus franches sur le front Est — mais rien de déterminant. Car, à bien y réfléchir, obtenir des gains de 15 km2 chaque jour, ce n’est pas suffisant pour effectuer une percée significative vers une occupation à grande échelle de l’Ukraine. En ce sens, rapporté aux objectifs initiaux fixés par Vladimir Poutine en 2022, on est très loin du compte et très proche d’une forme d’échec.

    Côté ukrainien, malgré la prise d’une enclave en territoire russe, on reste dans une position fragile sur le front Est. Kiev, outre un vrai problème de renouvellement des effectifs, reste par ailleurs trop dépendante des armes occidentales et de leur utilisation la plus efficace contre l’ennemi.

    Le changement de locataire à la Maison Blanche, un autre facteur d'incertitude

    L'élection de Donald Trump aux États-Unis explique la sensation de crispation de part et d’autre ces derniers jours. Chacun cherche à consolider, voire à améliorer, ses positions pour être dans la meilleure ou la moins mauvaise situation quand Donald Trump reviendra au pouvoir.

    D’où la décision de l’administration Biden d’autoriser les tirs à longue portée en territoire russe avec les missiles ATACMS et la fourniture controversée de mines antipersonnel à l’Ukraine.

    En réponse, Moscou met une pression maximale sur l'Ukraine avec des bombardements sur les villes et le tir du missile Orechnik, un missile balistique à portée intermédiaire, pouvant transporter des ogives nucléaires. Le message est à destination des Ukrainiens, mais aussi des Occidentaux. Ce missile, d’une portée de 3 000 à 5 500 km, pourrait en effet atteindre le territoire de la côte ouest des États-Unis et la quasi-totalité de l’Europe.

    À lire aussiMissiles ATACMS: quels bénéfices attendus pour l’Ukraine après le feu vert américain?

    Donald Trump laisse planer le flou sur ses intentions

    Il s'agit sans doute d'une stratégie délibérée. Durant sa campagne, il avait expliqué qu'il réglerait le conflit en Ukraine en 24 heures et, si possible, avant son investiture fin janvier. Et depuis, c'est le silence radio sur cette question.

    En plein brouillard trumpien, Russes et Ukrainiens font monter la pression. Chacun cherche à contrôler le niveau d’escalade néanmoins. Il n’en reste pas moins que la période qui nous mène au 20 janvier s'annonce périlleuse.

    Show more Show less
    3 mins
  • Les démocraties en péril financier?
    Nov 15 2024

    Au sein des États démocratiques, un défi est de plus en plus prégnant : le difficile équilibre à trouver entre réductions des déficits et investissements nécessaires à la modernisation de l’économie, avec l’impératif de la transition écologique. Et une question se pose : cette exigence contradictoire peut-elle menacer le fonctionnement des démocraties ?

    Les démocraties occidentales sont fragilisées par une forme de désaffection civique et par la concurrence féroce de modèles alternatifs, en particulier les modèles autoritaires russes et chinois. Mais le débat politico-économique autour du bon niveau de dépenses publiques prend de l’ampleur. On le voit notamment, sur des modalités différentes, dans des pays comme la France, l'Allemagne ou les États-Unis.

    Le niveau d’endettement pèse lourd dans le débat public. En France, le gouvernement de Michel Barnier tire la sonnette d’alarme. Avec un taux à 110 % du PIB, la dette représente à terme un danger sur l’équilibre financier du pays. En particulier à cause des taux d’intérêt de cette dette, qui représentent le 2ᵉ poste de dépenses ! Ce taux est également élevé aux États-Unis, où l’endettement équivaut à 122 % du PIB, mais les États-Unis, notamment avec le dollar, ont les reins plus solides auprès de leurs créanciers.

    Une situation différente en Allemagne

    En Allemagne, la dette ne dépasse pas les 60 % du PIB. Dans ce pays traumatisé par la catastrophe financière de la République de Weimar, qui a conduit à amener les nazis au pouvoir, ce « frein à l’endettement » est de plus en plus critiqué par certains partis, défendu mordicus par d’autres.

    Les premiers expliquent qu’il faut desserrer ce frein qui bloque le développement de l’économie, les seconds insistent sur la nécessité de rester rigoureux. Ces tensions ont provoqué l’éclatement de la coalition gouvernementale du chancelier Scholz — avec, à la clé, de nouvelles élections en février prochain.

    À lire aussi Crise politique en Allemagne : Scholz limoge le ministre des Finances, la coalition vole en éclats

    Le débat sur la dette est concomitant à celui sur le déficit budgétaire

    La dette sert en partie à combler les déficits budgétaires qui ne cessent de se creuser en France et aux États-Unis, deux pays qui en sont à 6 % de déficit budgétaire. En France, le gouvernement cherche désespérément à faire 60 milliards d’économies, avec des débats homériques à l’Assemblée nationale entre réductions des dépenses et nouvelles taxes.

    Aux États-Unis, Donald Trump a chargé Elon Musk de couper les dépenses publiques d’un tiers — cela représente pas moins de 2 000 milliards de dollars.

    En Allemagne enfin, le débat est presque à l’opposé. Comme sur la dette, des voix de plus en plus nombreuses demandent à sortir de la règle des 0,35 % de PIB maximum pour le déficit, qui empêche les dépenses d’investissement dans l’avenir et la sécurité du pays.

    Dans ces trois pays, il faut arbitrer plus que jamais entre les dépenses courantes (pour combler le déficit et financer la protection sociale) et les dépenses d’investissement pour la modernisation de l’économie et la transition écologique — qui peuvent justifier de recourir à l’emprunt. Et ces débats, qui peuvent paraître techniques, sont en fait extrêmement politiques. Car c’est sur ce terrain aussi que va se jouer l’avenir des systèmes démocratiques.

    À écouterÉtats-Unis: la nomination d’Elon Musk dans la future équipe Trump répond à «une volonté de taper fort»

    Show more Show less
    4 mins
  • Les Européens pourront-ils relever le défi Donald Trump?
    Nov 8 2024
    Donald Trump va faire son retour à la Maison Blanche après sa victoire à l'élection présidentielle américaine, face à la candidate démocrate Kamala Harris, le 5 novembre. Avec cette élection qui met le Vieux Continent au pied du mur, les Européens parviendront-ils à rester unis face au nouveau locataire du bureau ovale ? La première difficulté, ce sont les divisions idéologiques entre les Européens. Il y a les partisans d'une Europe fortement dépendante des États-Unis, notamment sur le plan militaire – on peut citer des pays comme la Hongrie ou encore la Pologne –, et ceux qui pensent que l'Europe doit prendre des mesures pour se débrouiller seule, en matière politique, diplomatique, économique et militaire. C'est bien sûr le point de vue du président français Emmanuel Macron, qui insiste sur la nécessité pour l'Europe de sortir d'une forme de naïveté. Faute de quoi, les Européens seraient réduits, selon la métaphore élyséenne, à devenir des « herbivores attaqués par des carnivores ».La deuxième difficulté, ce sont les deux poids lourds de l'Union européenne (UE). La France et l'Allemagne sont actuellement affaiblies, économiquement et politiquement. Le chancelier Olaf Scholz était même absent de la réunion de la Communauté politique européenne (CPE), après l'éclatement de sa coalition à Berlin survenue au pire moment.Une réduction de l'aide américaine à l'Ukraine redoutéeCes divisions doivent d'abord être surmontées sur le dossier ukrainien, car la crainte des Européens – et de Kiev bien sûr – est double : avec Donald Trump de retour à la Maison Blanche, on peut s'attendre à une réduction plus ou moins forte de l'aide américaine à l'Ukraine et, parallèlement, au lancement de négociations pour mettre un terme à la guerre, avec Washington, Moscou et Kiev. C'est du moins ce que souhaite le futur président américain. Et les Européens, là-dedans ?Volodymyr Zelensky, qui était à Budapest jeudi 7 novembre, les a implorés de ne pas céder aux pressions des États-Unis, ou pire encore, de la Russie, notamment sur deux points essentiels : le refus d'une renonciation à l'intégrité territoriale de l'Ukraine et le refus de l'abandon de l'adhésion à terme de Kiev à l'Otan. Pour l'instant, pas de réponse unanime de l'Europe. Le tout sur fond d'inquiétudes concernant les demandes de Trump sur les contributions financières des européens à l'Otan.Risque de guerre commerciale avec l'EuropeDonald Trump ne s'en cache pas : durant la campagne, le candidat républicain réélu a dit très clairement qu'il voulait taxer les produits européens exportés aux États-Unis, de 10 à 20% selon les cas. Pour lui, économiquement, l'Europe – qu'il n'a pas hésité à qualifier de « mini-Chine » – est un concurrent qu'il faut dominer, sinon laminer. Les flux commerciaux entre les États-Unis et l'UE sont très importants mais se font au détriment des Américains, avec plus de 300 milliards de dollars de déficit. C'est cela que le nouveau président veut corriger, d'abord en imposant aussi des droits de douane, mais aussi et surtout en musclant son appareil productif et ses investissements dans l'avenir, l'innovation numérique, la transition écologique... Là encore, comment l'Europe peut-elle réagir ?Pour cela, les Européens vont-ils vraiment adopter le plan Draghi, qui estime que l'Europe doit débloquer 600 à 8 000 milliards de dollars pour rattraper son retard par rapport aux États-Unis. Cette question est aussi importante que l'autonomie stratégique du Vieux Continent. Reste maintenant à passer aux actes, et pas en ordre dispersé. C'est là que tout se complique. À écouter aussiPrésidentielle aux États-Unis: «Le retour de Donald Trump va relancer les guerres commerciales»
    Show more Show less
    3 mins