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  • À quel point les plages sont-elles polluées par les plastiques ?
    Jul 3 2025

    Entre 4,8 et 12,7 millions de tonnes de plastique seraient déversées dans l’océan chaque année. Sous l’effet des courants marins, des « vortex de déchets » se sont formés. Selon des estimations, les deux tiers s'échoueraient in fine sur les plages. Une récente étude montre que du plastique est même enfoui sous le sable.

    Toutes les plages n'étant pas envahies de montagnes de plastiques, des chercheurs se sont demandé où ils pouvaient bien passer.

    Astrid Delorme, en post-doctorat à l’Ifremer et autrice d’une étude parue dans le Marine Pollution Bulletin, a mené des investigations sur des plages à Hawaï parce que l'archipel est le réceptacle de beaucoup de déchets venant de l’un des « vortex de plastiques » de l’océan Pacifique. Du sable a été prélevé jusqu’à un mètre de profondeur. Résultat : 91 % des plastiques n’étaient pas en surface, mais en dessous. « On a trouvé des plastiques jusqu'à un mètre de profondeur », explique Astrid Delorme. « On a trouvé par exemple 2000 à 3 000 particules de plastique à 60 à 90 cm de profondeur. Ce que nous on a trouvé, c'étaient plutôt des petits fragments, d’une taille comprise entre 5 à 6 cm. »

    Fragmentation

    Des plastiques susceptibles de se fragmenter encore pour devenir des microplastiques, d’autant que leur fragilité dans l’environnement a été mesurée. « On a vu que 92 % des plastiques qu'on a échantillonnés sont fragiles dans des environnements où il y a des vagues, des mouvements de sable, etc. Cette fragilité rend la formation de microplastiques hautement probable », explique Astrid Delorme.

    La concentration varie en fonction des saisons. Davantage de plastiques ont été retrouvés en hiver, peut-être en raison du renouvellement du sable. La grosseur des grains de sable jouerait aussi sur la rétention et la taille des fragments de plastiques.

    Impact environnemental et culturel

    Quoi qu'il en soit, il est difficile d’y remédier. Nettoyer davantage en surface avant que les déchets se fragmentent pourrait permettre de réduire la pollution souterraine. Mais draguer et filtrer le sol en profondeur parait difficilement envisageable, sans compter que cela risquerait d’endommager les écosystèmes et à Hawaï des sites funéraires ancestraux.

    Astrid Delorme voit d'ailleurs dans cette pollution de lieux de sépulture un manque de respect.

    Dans le cadre de cette étude, l’impact sur l’écosystème n’a pas été analysé. Mais la chercheuse fait l'hypothèse de conséquences potentielles sur la flore et la faune qui vit dans le sable, comme des petits crabes.

    Dans le nid des tortues

    Ailleurs, le plastique sur les plages a été identifié comme un élément perturbateur de la reproduction des tortues. « On remarque sur des sites comme Aldabra que les tortues ne peuvent plus creuser leur nid à cause de l'accumulation de plastique », explique Simon Bernard, président de Plastic Odyssey, qui en accord avec l’Unesco s'apprête à nettoyer cet atoll des Seychelles. « Et la quantité de microplastiques dans le sable influe sur la température des nids et donc a une influence sur le sexe des tortues. Il y a moins de femelles qui naissent », ajoute-t-il.

    En Chine, des microplastiques ont été retrouvés dans le fond de nids de tortues. En Floride, aux États-Unis, il en a même été détecté dans des œufs non viables.

    Est-ce que le nettoyage des plages permettrait de réduire la quantité de grands et microplastiques ? Peut-être, mais la tâche est déjà titanesque d’où les appels à limiter la production.

    À lire aussiPollution plastique: le navire «Plastic Odyssey» fait escale aux Comores

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  • Comment le dérèglement climatique affecte-t-il notre sommeil ?
    Jun 26 2025

    Dans le scénario d'un monde à +1,5 degré, les problèmes de santé humaine vont augmenter. Et votre sommeil lui aussi est largement en danger…

    Ce n'est pas un secret, et vous-même en avez peut-être fait l'expérience : lors des épisodes de canicule, le temps et la qualité de votre sommeil en prennent un coup. Des chercheurs danois ont même publié une étude sur le sujet en 2022, et après une expérience sur près de 45 000 personnes dans 68 pays, ils sont arrivés à plusieurs conclusions. D'abord, l'être humain dort moins longtemps à cause des températures élevées. Le sommeil met aussi plus de temps à arriver, car le corps met plus de temps à refroidir, alors que c'est nécessaire pour s'endormir. D'ici la fin du siècle, avec le réchauffement climatique, la population mondiale pourrait perdre 50 à 58 heures de sommeil par an.

    La hausse globale des températures pourrait augmenter de près de 45 % les cas d'apnée du sommeil

    Les cas d'apnée du sommeil pourraient aussi fortement augmenter d'ici la fin du siècle, selon une étude menée très récemment par des chercheurs en Australie. La hausse globale des températures pourrait augmenter de près de 45 % les cas d'apnée du sommeil. L’apnée se traduit par des pauses respiratoires qui surviennent très fréquemment lorsque vous dormez, et ce n'est pas normal.

    Comment explique-t-on cette augmentation ? L'apnée du sommeil est d’abord plus sévère en phase de sommeil léger, que pendant le sommeil profond. Et plus la température est haute, plus le sommeil est léger. Et la différence entre ces deux stades de sommeil est essentielle pour comprendre l'augmentation des cas d'apnée du sommeil, souligne Bastien Lechat, chercheur à Flinders University à Adélaïde en Australie : « Au sommeil de stade léger, les muscles tendent à être plus relaxés. En sommeil plus profond, on met plus d’effort pour essayer de respirer et ça nous aide à garder notre rythme respiratoire sans qu’on fasse de l’apnée du sommeil. »

    Le problème, c'est que près d'un milliard de personnes dans le monde souffrent déjà d'apnée du sommeil… Et cela favorise d'autres complications de santé, explique Bastien Lechat : « L’apnée du sommeil est associée à un plus gros risque de dépression, d’Alzheimer, d’avoir un accident de voiture aussi. On a deux fois plus de chance d’avoir un accident de voiture quand on fait de l’apnée du sommeil. C’est aussi associé à beaucoup de maladies cardiovasculaires comme l’hypertension. Toutes les maladies chroniques sont associées avec l’apnée du sommeil. »

    Et parmi les mesures pour limiter l'apnée du sommeil : faire du sport régulièrement, perdre du poids si nécessaire, arrêter le tabac par exemple… Le patient peut aussi être appareillé la nuit avec de l'air sous pression envoyé dans un masque. Quoi qu'il en soit, les chercheurs estiment que le réchauffement climatique pourrait entraîner une augmentation jusqu'à 3 fois du coût sociétal de l’apnée du sommeil d'ici la fin du siècle.

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  • Pourquoi le changement climatique change-t-il aussi le goût de nos aliments ?
    Jun 26 2025

    Pourquoi le changement climatique change-t-il aussi le goût de nos aliments ? C'est la question d'environnement du jour. Le réchauffement climatique est en effet capable de modifier le goût de notre nourriture et également de nos boissons. Les détails dans cette chronique.

    Ce mois-ci, une étude scientifique attirait l'attention sur le goût du « gin tonic » (à consommer avec modération) mis à mal par le changement climatique. En cause : des conditions météorologiques très fluctuantes, et plus extrêmes. Selon les chercheurs, le goût des baies de genièvre qui composent cette boisson alcoolisée pourrait ainsi s’en retrouver modifié. Pour arriver à ces conclusions, les scientifiques ont comparé des baies issues de plusieurs pays d'Europe. En analysant la teneur des arômes, ils se sont rendu compte que les baies de chaque pays avaient des profils chimiques différents, de quoi modifier les notes boisées ou florales par exemple. À l'origine de ces différences : la quantité de précipitations.

    Outre cette boisson alcoolisée, les fruits de manière générale méritent une attention particulière. Des études sur les pommes par exemple, sont arrivées à des conclusions similaires. Avec l'augmentation de la température moyenne, une baisse d'acidité et une hausse de sucre apparaît depuis les années 70. Pourtant, les méthodes d'arboriculture sont restées les mêmes.

    Les laitages concernés

    En France, plusieurs chercheurs de l'INRAE se sont penchés sur la question des produits laitiers, et notamment des fromages. Selon leurs recherches, le fromage est également altéré par le dérèglement climatique, mais par d'autres facteurs : celui de l'adaptation des éleveurs aux aléas climatiques pour nourrir leurs vaches. En règle générale, les bovins se nourrissent d'herbes, elles-mêmes touchées par la sécheresse. Dans le massif central, où s'est déroulée l'étude, la culture du maïs se développe face au réchauffement climatique : « L’introduction de cette plante dans les rations des vaches peut avoir un effet sur le fromage. Et la grande conclusion de notre étude, c'est que malgré cette introduction du maïs en sillage dans les rations, il faut veiller absolument à garder une part d’herbe pâturée dans l’alimentation des vaches laitières si on ne veut pas trop détériorer la qualité des fromages, qu’elle soit nutritionnelle ou gustative », explique Matthieu Bouchon, Ingénieur en charge des expérimentations à l'Inrae.

    La qualité nutritionnelle des aliments aussi touchée

    Au-delà du goût, la qualité nutritionnelle du fromage est donc aussi touchée. Les acides gras par exemple (ceux qu'on appelle Oméga 3 ou Omégas 6) proviennent directement de ce que les animaux mangent. Or, l'herbe permet de produire du lait plus riche en Oméga 3 très favorable pour la santé, alors que les Omégas 6 sont favorisés par le maïs et peuvent avoir des effets plus délétères pour nous.

    À lire aussiLe Comté, appellation d’origine fraternelle, et politique

    Si goût des aliments semble condamné à évoluer à cause du dérèglement climatique, il y a des solutions à mettre en place, explique Matthieu Bouchon, l'Ingénieur en charge des expérimentations à l'Inrae : « L’objectif de ce type d’étude est justement d’alerter les organismes de gestion et de défense des différentes appellations fromagères pour qu’ils tiennent compte de ça dans leur cahier des charges. Le but est de continuer à mettre l’accent sur le maintien des prairies dans la ration des vaches laitières, pour éviter justement de perdre la typicité des produits. » D’autant plus que garder les prairies est bon pour la préservation de la culture gastronomique, mais aussi pour la préservation de l'environnement, car ce sont des puits de carbone. Les prairies compensent en partie les émissions de gaz à effet de serre des vaches.

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  • Pourquoi les banques ont-elles plus financé les énergies fossiles en 2024?
    Jun 24 2025

    Selon le rapport annuel « Banking on Climate Chaos » publié il y a quelques jours, le financement des énergies fossiles par les banques a augmenté de 25 % l'an dernier. Une augmentation de 162 milliards de dollars par rapport à 2023.

    Charbon, gaz, pétrole... Les projets financés par les banques sont multiples. Rien que pour l'année 2024, sur 65 banques étudiées, le rapport « Banking on Climate Chaos » parle de 869 milliards de dollars. Une grosse enveloppe qui peut aller vers de l'extraction par exemple, ou encore vers des infrastructures de transports. Plus précisément, et pour près de la moitié de cette somme, ce sont des financements vers des entreprises qui ont des projets d'expansion.

    Le problème derrière cette augmentation des financements vers les énergies fossiles polluantes et émettrices de gaz à effet de serre, est que nos chances de limiter le réchauffement climatique s’amoindrissent. Pourtant en 2021, beaucoup de banques avaient annoncé soutenir les objectifs de neutralité carbone lors de la COP 26. Depuis, le financement global des combustibles fossiles était en baisse.

    Volonté politique et taux d’intérêt

    Selon l’ONG Reclaim Finance, ce constat peut s’expliquer par un contexte global de retour en arrière des autorités publiques et des acteurs financiers. On peut parler par exemple de la Commission européenne qui a proposé de repousser l'application de certains textes du Green Deal (Pacte Vert). Aux États-Unis, le retour de Donald Trump et sa politique pro énergies fossiles peut aussi jouer.

    Autre élément d’explication : les taux d'intérêt. Pendant plusieurs années, ils étaient remontés et pouvaient peut-être dissuader les entreprises du secteur pétrolier ou gazier à avoir recours aux banques, d'autant que les grandes entreprises faisaient des superprofits grâce à la flambée des cours. Mais l'an dernier, les intérêts étaient plus intéressants pour elles.

    À lire aussiLes plus grandes économies investissent des milliards dans les énergies fossiles à l'étranger, selon une ONG

    Dans le rapport « Banking on Climate Chaos », c'est la banque JP Morgan qui arrive en première position avec 53,5 milliards de dollars de soutien aux énergies fossiles l’an dernier. On retrouve juste derrière Bank of America et Citigroup. Dans les arguments pour se défendre, certaines banques affirment financer en parallèle la transition et le développement durable. Mais « ce n'est pas la bonne méthode » explique Lucie Pinson, Directrice de l'ONG Reclaim Finance qui a travaillé sur le rapport : « Dans tous les cas, ça ne suffit pas de financer du renouvelable pour être dans une bonne direction. Il faut vraiment réduire les financements aux énergies fossiles progressivement, en commençant dès maintenant par un arrêt des financements à l’expansion – au développement – de nouveaux projets, de charbon, de gaz et de pétrole. »

    Contraindre les banques

    Selon Lucie Pinson - Directrice de l'ONG Reclaim Finance – la solution est de contraindre les banques à agir : « Les banques ont continué "business as usual" malgré les grandes promesses qu’elles ont pu faire sur le climat. Donc il va falloir que des acteurs interviennent, que les parties prenantes des banques se mobilisent pour pousser les banques, contraindre les banques à agir que ce soit à travers l’adoption de mesures réglementaires ou à travers la mobilisation des autorités de supervision… » Et les acteurs qui doivent se mobiliser sont multiples, explique l'ONG : société civile, clients, actionnaires, et bien sûr, les autorités publiques.

    À lire aussiAllons-nous réussir à nous passer des énergies fossiles ?

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  • La playlist écologiste: la musique peut-elle sauver le monde?
    Jun 19 2025

    À l'occasion de la fête de la Musique le 21 juin, sélection de quelques chansons célèbres sur l'environnement, la nature et la crise climatique.

    « Earth Song », Michael Jackson

    « Earth Song » (la chanson de la Terre), est sans doute le titre écolo le plus écouté au monde, parce que c'est Michael Jackson. À sa sortie en 1995 sur l’album HIStory, le King of the pop (le roi de la pop) dit vouloir faire entendre la voix de la planète, et chante « la Terre qui pleure » : « Nous avons transformé les royaumes en poussière ». « Et les éléphants ? Avons-nous perdu leur confiance ? », s’interroge-t-il aussi. Assurément.

    « Mercy, Mercy me (The Ecology) », Marvin Gaye

    L’artiste phare de la soul américaine publie en 1971 l’un des plus grands albums de l’histoire de la musique, où il aborde la guerre du Vietnam ou les menaces sur l’environnement. « Mercy, mercy me » (Pitié, pitié de moi), l’un des tout premiers tubes écolos, parle du pétrole dans les océans, des « poissons pleins de mercure », et de « cette terre surpeuplée ». Un titre emblématique qui accompagne l’émergence de l’écologie politique dans les années 1970.

    « Beds are burning », Midnight Oil

    Le tube du groupe de rock australien est d’abord une chanson sur la reconnaissance des Aborigènes, avant de s'imposer comme un hymne écologiste planétaire. Le chanteur de Midnight Oil, Peter Garrett, deviendra d’ailleurs en 2007 ministre de l'Environnement. « Comment pouvons-nous dormir pendant que nos lits brûlent ? », interroge le refrain d’une chanson sortie en 1987. En 2002, lors d’un célèbre discours prononcé au Sommet de la Terre à Johannesburg, Jacques Chirac s’inquiète : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». Mais il n’y aucun rapport : le président français ne connaissait pas Midnight Oil. « Beds are burning » est repris en 2009 par tout un tas de stars (Youssou N’Dour ou Marion Cotillard), pour la COP15 de Copenhague, avec le succès que l'on sait : la COP est un échec.

    « Respire », Mickey 3D

    Sacrée meilleure chanson de l'année aux Victoires de la musique 2004, Respire raconte à un « gamin » comment les hommes ont saccagé la Terre : « T'es pas né dans un chou mais plutôt dans un trou / Qu'on remplit tous les jours comme une fosse à purin ». Le pessimisme est de mise dans le refrain : « Il faut que tu respires, c'est demain que tout empire / Tu vas pas mourir de rire, et c'est pas rien de le dire ». Une chanson verte et noire.

    « Le Monde est chaud », Tiken Jah Fakoly (avec Soprano)

    La chanson a donné son nom à l’album brûlot sorti par la star ivoirienne en 2019. « Le monde est chaud / Le Monde a chaud », alterne le refrain. « Je suis à bout de souffle/Je vois les fleurs fanées/L'atmosphère nous étouffe », chante Tiken Jah Fakoly, en duo avec le Franco-Comorien Soprano. Il dénonce l'indifférence des dirigeants africains face à la crise climatique. « Ils n'ont qu'une chose en tête / Leur paradis fiscal ». À la sortie de l’album, Tiken Jah Fakoy rappelle « la mission du reggae : éveiller les consciences ».

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  • En quoi les data centers sont-ils des gouffres écologiques?
    Jun 18 2025
    La consommation d'énergie (et d'eau) des centres de stockage de données informatiques est en constante augmentation. Au risque de créer des conflits d'usage alors que de plus en plus de data centers sont construits dans des zones frappées par la sécheresse. On les utilise tous les jours, sans le savoir, mais leur impact sur la planète pourrait s'avérer catastrophique. On parle ici des data centers, des centres de stockage de données informatiques par où transitent tous nos usages numériques : mails, moteurs de recherche, vidéos, intelligence artificielle... À lire aussiPourquoi investir plusieurs milliards d’euros dans des data centers en France? Les chiffres donnent une idée de l'ampleur du problème : alors que le numérique représente aujourd'hui 3 à 4% des émissions de gaz à effet de serre, on compte au moins 6 000 gros data centers dans le monde, et il y en aura 1 000 de plus à la fin de l'année. Ils représentent aujourd’hui jusqu'à 1,5% de la consommation mondiale d'électricité, et ce sera 3% en 2030, l'équivalent de la consommation annuelle d'un pays comme le Japon. Après la fabrication des équipements, les data centers sont la deuxième source de pollution du numérique. Chaleur numérique La quantité de données informatiques en circulation sur la planète, et qui transitent le plus souvent par les data centers, augmente chaque année de 40%. Le moteur de cette croissance, c'est l'intelligence artificielle. L’IA mobilise des machines et des calculs de plus en plus impressionnants. La dernière version de Chat GPT consomme ainsi 10 à 100 fois plus d'énergie que la précédente. En 2040, 3 milliards de personnes pourraient utiliser l'intelligence artificielle. Si les data centers consomment autant d’énergie, c’est d’abord pour faire tourner des ordinateurs qui ne sont jamais éteints pour pouvoir répondre à n'importe laquelle de nos sollicitations, 24 heures sur 24. Ces grosses machines ont aussi besoin d'être refroidies – à notre niveau, quand on utilise un PC, ça chauffe alors imaginons la chaleur que dégagent des milliers de mètres carrés d'ordinateurs... Les systèmes de refroidissement représentent à eux seuls 40% de la consommation d'énergie des data centers. Pour refroidir, on utilise de l'électricité, mais aussi de l'eau. Pour une vingtaine de questions qu'on lui pose, ChatGPT consomme un demi-litre d'eau. Sécheresse numérique On en arrive pourtant à ce paradoxe : de plus en plus de data centrers sont construits dans des zones arides. Pour éviter la corrosion des ordinateurs et des composants, les géants de la tech privilégient les zones où le taux d'humidité est faible. Microsoft a reconnu que plus de 40% de l'eau qu'il utilisait provenait de régions en stress hydrique. Des projets de data center sont prévus en Arabie saoudite. Tiktok va en construire un dans une région du Brésil frappée par la sécheresse. Quant à Amazon, il va lancer trois nouveaux data centers dans la région de Saragosse, l’Aragon, qui connaissait déjà des problèmes de sécheresse au mois de mars. Boire ou prompter, il va falloir choisir. À lire aussiL'impact des data centers à Marseille, hub internet mondial qui se transforme Face à ce « palmarès » environnemental, les entreprises de la tech se disent plus vertueuses. En région parisienne, la construction d'un centre de données s'accompagne de la promesse de chauffer 7 000 logements. Aux Etats-Unis, pour utiliser une énergie décarbonée, un data center a même été installé au sein d'une centrale nucléaire, ce qui a fait scandale. Les entreprises de la tech misent aussi beaucoup sur la géothermie, pour produire leur propre électricité, en puisant l'énergie dans les entrailles de la Terre, jusqu'à 8 000 mètres sous terre aujourd’hui. Mais à quel prix ? Pour forer aussi profondément, on utilise des composés chimiques qui contiennent du plomb et de l'arsenic, avec le risque d'empoisonner les nappes phréatiques. Il a aussi été démontré que la géothermie pouvait provoquer des séismes. Oui, la révolution numérique est bel et bien un tremblement de terre.
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  • L'avion doit-il être plus cher?
    Jun 17 2025

    Le secteur de l'aviation commerciale est responsable d'environ 3% des émissions de gaz à effet de serre. Faut-il alors augmenter le prix des billets pour promouvoir des moyens de transport plus climato-compatibles, comme le train ?

    Dès l’ouverture du Salon du Bourget, le plus grand salon aéronautique au monde qui se tient près de Paris, le constructeur d’avions Airbus a roulé des mécaniques en annonçant ce lundi des commandes pour plus de 120 appareils, à la hauteur de la croissance continue du secteur. On prend de plus en plus l’avion dans le monde, alors qu’il faudrait au contraire freiner, pour des raisons climatiques évidentes. Le transport aérien représente environ 3% des émissions mondiales de CO2, le principal gaz à effet de serre, sans parler d'autres effets dans le réchauffement climatique.

    L’avion devrait-il ainsi être plus cher ? La question se pose au regard de certaines aberrations. Il y a quelques mois, un couple de Britannique habitant les Cornouailles, à la pointe sud-ouest de l'Angleterre, voulaient aller à Manchester, dans le nord de l'Angleterre, à 430 kilomètres de chez eux. Ils ont préféré faire 2 000 km en avion en allant passer une nuit à Malaga, dans le sud de l'Espagne, parce que l'avion était moins cher, 182 euros en tout, nuit d'hôtel comprise, alors que leur voyage en train leur aurait couté 474 euros. L'avion leur est revenu 2,5 fois moins cher que le train.

    À lire aussiBudget de la France: de lourdes taxes sur les billets d'avions sont prévues

    L'avion pollue

    D'un strict point de vue économique, l'avion était plus rentable. Mais sur le plan environnemental, la question est beaucoup plus discutable. En train, le couple d'Anglais aurait dépensé ou émis à peu près 4 kilos de CO2 chacun. En choisissant l'avion, leur bilan carbone a explosé à 375 kilos de CO2. Ils ont préservé leur pouvoir d’achat mais ils ont un peu plus pollué la planète. L'avion n'est plus réservé à une élite mais la démocratisation a un vrai coût climatique. Cinq milliards de billets d'avions ont été vendus dans le monde en 2024, soit cinq fois plus qu'il y a 35 ans.

    C’est notamment l’effet low-cost, l’essor des compagnies aériennes à bas coût. Elles vendent certains billets à perte pour remplir leur avion, sachant qu'elles se rattrapent sur le reste. 40% de leur chiffre d'affaires provient de la vente de services complémentaires comme le choix du siège ou la vente de repas.

    Par rapport au train, l'avion est avantagé et subventionné. Le kérosène, le carburant des avions, n'est pas taxé, alors que l’électricité qui fait rouler les trains est assujettie en France à 20% de TVA. Dans le transport, ce qui coûte le plus cher, ce sont les infrastructures. Et en avion, à part l'aéroport, le ciel est gratuit alors qu'en train, il faut utiliser des rails. En France, la redevance payée par la SNCF au réseau ferré représente 40% du prix du billet.

    Un vol tous les dix ans

    Il faudrait augmenter le prix des billets d'avions pour espérer limiter le trafic aérien, dans un monde idéal. Mais on est dans un monde libéral. Pour renchérir le prix du billet, il y a bien la taxe Chirac, la taxe de solidarité sur les billets d'avion lancée il y a 20 ans et appliquée par une poignée de pays. Elle n'a pas vraiment d’effet dissuasif.

    Il y a deux ans, la France avait aussi voulu imposer un prix plancher des billets d'avions. Elle n'a pas été suivie. Il faut aussi savoir que 50% des émissions de CO2 de l'aviation est générée par seulement 1% des voyageurs, les plus riches, pour qui le prix du billet n’est pas un obstacle.

    Limiter l'avion pour limiter le réchauffement climatique, c’est l’une des recommandations du Giec (les experts internationaux du climat). Pour atteindre des objectifs climatiques raisonnables, des hausses de températures supportables, il faudrait limiter ses émissions de CO2. A 2 tonnes par an pour un Français qui émet aujourd'hui en moyenne un peu plus de 10 tonnes. Deux tonnes de CO2, c'est justement un aller-retour Paris-New-York. En conséquence, toujours selon le Giec, il ne faudrait prendre l'avion qu'une fois tous les dix ans.

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